Chez Kersanté, la prévention est au cœur de notre projet de santé. Le centre de santé Kersanté de Lorient illustre pleinement cette démarche en étant à l’initiative d’un partenariat innovant avec l’Etablissement Public de Santé Mentale (EPSM). Cette convention permet de renforcer l’accès aux soins en santé mentale grâce à l’intervention d’infirmier·ères en pratique avancée, et traduit notre volonté de construire des parcours de soins adaptés, coordonnés et ouverts sur le territoire.
Entretien avec Marion Bailleul, Responsable du centre Kersanté Lorient Monistrol
Pouvez-vous présenter le projet de partenariat avec l’EPSM et expliquer l’origine de cette initiative ?
Ce partenariat a été pensé pour améliorer la prise en charge globale des patients en santé mentale, en s’appuyant sur une équipe pluriprofessionnelle. En effet, dans un contexte de pathologie psychiatrique, les symptômes somatiques peuvent parfois être sous-estimés ou stigmatisés. L’idée était donc de créer un dispositif qui permette d’accompagner les patients de manière complète, en lien avec leur suivi médical habituel.
L’initiative est née grâce au Dr Bourouga Nedgema, très investie dans la dynamique territoriale et également vice-présidente de la CPTS de Lorient. Nos échanges réguliers en Réunions de Concertation Pluridisciplinaires (RCP) ont favorisé la mise en place de ce partenariat avec l’EPSM. Concrètement, cela se traduit aujourd’hui par la présence d’une infirmier·ère en pratique avancée (IPA) en santé mentale, une demi-journée toutes les deux semaines, au sein de Kersanté. Deux IPA de l’EPSM se relaient pour assurer cette mission.
Quel est le rôle précis de l’IPA en santé mentale dans ce dispositif, et comment s’articule-t-il avec les autres professionnels de santé du centre ?
Ce sont les médecins du centre qui adressent les patients à l’IPA en santé mentale. L’IPA prend ensuite directement contact avec la personne pour fixer un rendez-vous et préciser le motif de consultation. Cela peut concerner, par exemple, la mise en place d’un traitement antidépresseur primaire, l’évaluation d’un syndrome dépressif récent ou d’autres problématiques ne nécessitant pas l’intervention immédiate d’un·e psychiatre.
Après chaque consultation, un compte rendu est rédigé et transmis de manière sécurisée afin d’être intégré au dossier médical du patient. Les IPA apportent également une expertise précieuse en pathologies psychiques, ce qui enrichit les pratiques des médecins généralistes. Leur rôle n’est donc pas uniquement clinique, mais aussi pédagogique et collaboratif.
Comment se déroule concrètement le parcours des patients adressés à l’IPA en santé mentale au sein de Kersanté ?
Le médecin présente la démarche au patient, en expliquant qu’il peut rencontrer une infirmier·ère en pratique avancée de l’EPSM pour un premier rendez-vous. Cette présentation vise à mettre la personne en confiance et à éviter le sentiment de stigmatisation que pourrait provoquer une orientation directe vers un·e psychiatre ou vers le Centre médico-psychologique (CMP).
Une fois l’accord du patient obtenu, le médecin transmet la demande à l’IPA, qui fixe le rendez-vous sur les créneaux dédiés au sein de Kersanté. L’avantage est que la consultation se déroule dans un lieu familier, ce qui favorise l’adhésion et la continuité du suivi.
Quels bénéfices ce dispositif apporte-t-il aux patients, notamment en termes de prévention et de déstigmatisation des soins en santé mentale ?
Le premier bénéfice est de permettre une évaluation initiale en santé mentale sans recourir directement à un·e psychiatre. Pour un état dépressif débutant, un trouble anxieux ou la mise en place d’un traitement de première intention, l’IPA peut intervenir de manière adaptée et sécurisée, en lien avec le médecin traitant.
Ce parcours facilite l’acceptation du suivi par les patients. Être reçu dans un centre de santé qu’ils connaissent, sur recommandation de leur médecin, est souvent perçu comme moins stigmatisant que de franchir les portes du CMP. Cela renforce la confiance, permet une orientation progressive vers des ressources spécialisées si nécessaire, et contribue à prévenir l’aggravation des situations.
Quels sont les principaux défis rencontrés lors de la mise en place de ce partenariat et quelles perspectives voyez-vous pour son développement futur ?
Le principal défi a été organisationnel. Lorsque je suis arrivé en poste, la convention était déjà en discussion mais incomplète. Il a fallu clarifier le cadre, reformuler certains points et obtenir l’accord de toutes les parties. La signature définitive a eu lieu en juillet, ce qui a coïncidé avec la période estivale et les congés, rendant le démarrage plus lent.
Depuis la rentrée, seules deux permanences ont pu avoir lieu, ce qui ne nous donne pas encore suffisamment de recul. Néanmoins, la dynamique est positive : l’équipe s’agrandit, les médecins sont de plus en plus sensibilisés, et nous veillons à bien communiquer sur le dispositif pour qu’il soit utilisé pleinement.
À terme, l’objectif est d’intégrer ce modèle dans d’autres centres du réseau, car les besoins en santé mentale sont importants et la collaboration avec l’EPSM apporte une réelle plus-value dans la prise en charge des patients.
Article publié le 9 octobre 2025